L’annonce récente de nouveaux tarifs douaniers américains contre la Chine remet sur le devant de la scène un levier économique redouté : la dévaluation du yuan. Pékin pourrait y recourir pour amortir l’impact commercial, provoquant de facto un mouvement de fuite de capitaux vers les cryptomonnaies. Arthur Hayes, fondateur de BitMEX, prévoit un scénario déjà vu en 2015 et 2019, avec une adoption opportuniste du bitcoin ( BTC ) par des investisseurs chinois soucieux de protéger leur patrimoine.

Le yuan menacé par les sanctions douanières : Bitcoin en embuscade

Le 7 avril, les autorités américaines ont annoncé leur intention d’imposer de nouveaux tarifs sur les importations chinoises. En réponse, la Chine a promis de « lutter jusqu'au bout », selon une déclaration ferme de son ministère du Commerce. Cette posture offensive pourrait s’accompagner d’une dévaluation stratégique de la monnaie nationale pour préserver la compétitivité des exportations.

Arthur Hayes voit dans ce scénario un catalyseur potentiel pour le marché des cryptomonnaies. Selon lui, si la Banque populaire de Chine décidait d’affaiblir le yuan, les investisseurs locaux pourraient se tourner massivement vers le bitcoin, perçu comme une valeur refuge hors de portée des autorités. Cette anticipation repose sur des précédents concrets, déjà documentés dans l’histoire récente du yuan.

Une fuite de capitaux déjà observée par le passé

L’année 2015 reste une référence clé. En août, la Chine avait abaissé de près de 2 % la valeur du yuan face au dollar américain, provoquant un regain d’intérêt pour les cryptomonnaies. Bien que le lien de causalité directe reste débattu, cette période a vu une corrélation forte entre dévaluation et hausse du volume d’échange en cryptoactifs.

Même constat en 2019 : le passage du yuan sous le seuil psychologique de 7 pour 1 dollar a coïncidé avec une hausse de plus de 20 % du Bitcoin en l’espace d’une semaine. Cette évolution suggère que les investisseurs chinois ont alors utilisé la cryptomonnaie comme un moyen de couverture contre la perte de pouvoir d’achat de leur monnaie nationale.

Les riches Chinois misent sur la crypto pour contourner les restrictions

Cette stratégie est d’autant plus cohérente dans un contexte de contrôle strict des capitaux. En Chine, les citoyens ne peuvent légalement transférer à l’étranger que l’équivalent de 50 000 dollars par an. Pour les fortunes privées, cela constitue une barrière, souvent contournée via des actifs numériques moins régulés. Ben Zhou, PDG de la plateforme Bybit, confirme cette tendance : chaque dépréciation importante du yuan s’accompagne d’un flux de capitaux vers les cryptomonnaies.

Les détenteurs de patrimoine cherchent avant tout à diversifier leurs avoirs face à l’incertitude monétaire. Le Bitcoin, avec sa liquidité mondiale et son indépendance structurelle, devient un choix stratégique.

Bitcoin : L'alternative face à la défiance monétaire grandissante

Au-delà de la simple réaction conjoncturelle, la dévaluation monétaire alimente un climat de défiance plus large envers les institutions financières. Ce phénomène, déjà sensible dans certaines économies émergentes, s’installe progressivement dans des marchés plus structurés comme la Chine. Dans ce contexte, le bitcoin bénéficie de son image d’actif décentralisé et inaltérable. Son adoption s’inscrit alors dans une logique de sécurisation patrimoniale face aux politiques monétaires expansionnistes ou défensives.

Selon Ryan Lee, analyste en chef chez Bitget Research, la chute de 30 % de la capitalisation du marché crypto – passée de 3,73 à 2,54 billions de dollars – s’analyse davantage comme une correction saine que comme une crise structurelle. Il rappelle que des reculs similaires, comme celui de 50 % en 2021, ont précédé de nouveaux sommets.

Lee souligne par ailleurs que la domination croissante du bitcoin, désormais proche de 60 %, témoigne de la solidité des fondamentaux du marché. Il anticipe que si les tensions commerciales venaient à s’intensifier, un repli temporaire vers les 70 000 à 75 000 dollars serait envisageable, mais constituerait une opportunité d’accumulation stratégique à long terme. À horizon fin 2025, il envisage une projection haussière entre 95 000 et 100 000 dollars pour le bitcoin, porté par l’adoption institutionnelle et le cycle de réduction de moitié.

Dans cette optique, une approche prudente mais opportuniste – via un investissement échelonné – permettrait aux investisseurs de tirer parti des incertitudes géopolitiques, tout en gardant un œil attentif sur les altcoins émergents comme Solana, qui pourraient offrir des rendements plus volatils mais attractifs.